2017年 04月 13日
「信濃毎日新聞」(2017/04/12朝刊) の記事
Un monument en souvenir des persécutions dont souffrit le monde du haiku
pendant la Seconde Guerre mondiale
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Seegan Mabesoone, poète de haiku habitant à Nagano, à l'origine du collectif.
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Un groupe de bénévoles, dont Seegan Mabesoone (48 ans, habitant Nagano-ville), s'est formé dans le but d'ériger un "Monument à la mémoiredes poètes de haiku persécutés pendant la Seconde Guerre mondiale".
Un emplacement, près du "Mémorialdes jeunes peintres décédés pendant la Seconde Guerre mondiale" ("Mugonkan") à Ueda (département de Nagano), est prévu pour cette occasion.
Monsieur Mabesoone a répondu à notre journal : "Nous souhaitons réhabiliter ces jeunes poètes et leurs sacrifices, créer un lieu de recueillement. Aussi, il nous semble qu'il est important, particulièrement en ce moment, de se remémorer l'Histoire, de se souvenir que toute liberté de pensée, de parole et d'expression fut alors niée".
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Un monument pour la liberté de pensée et d'expression...
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L'origine de ce projet remonte à la publication de "Haïkusde la résistance japonaise (1929-1945)" en octobre dernier, recueil dans lequel M. Mabesoone mettait la lumière sur les poètes persécutés pendant la guerre, dont, par exemple, Issekiro Kobayashi - originaire du village d'Aoki à Nagano. "Dans mon pays d'origine, la France, les poètes qui ont resisté au nazisme sont aujourd'hui largement reconnus, mais ici, il semble que l'on ait tendance à oublier les persécutions dont furent victimes les poètes de haiku de cette époque". Partant de ce constat, M. Mabesoone avait déjà exprimé dans son livre "la necessité d'ériger un monument".
A la suite de la publication dudit recueil, de nombreux lecteurs lui ont manifesté leur soutien, et un collectif a commencé à se créer. A partir du mois de mars, des demandes de parrainage ont été envoyées à des poètes, chercheurs, hommes du monde de la culture de tout le pays, et 55 personnalités ont déjà rejoint le mouvement. Dès que la liste définitive des soutiens officiels sera fixée – vers la fin du mois de mai, une collecte de fonds sera ouverte au grand public à partir de l'été.L'inauguration du monument pourrait avoir lieu dès l'été 2018.
Les trois principaux parrains du projet sont M. Mabesoone, M. TōtaKaneko (97 ans) – Maître de haïku du cercle “Kaitei” auquel appartient aussi Mabesoone, et M. Seiichiro Kuboshima (75 ans) – Président du Mémorial "Mugonkan". M. Kaneko réalisera la calligraphie qui sera gravée sur la stèle. M. Kaneko a vécu la Seconde Guerre mondiale sur le front du Pacifique, en tant que soldat. Il a déclaré à notrejournal : "Les purges dont furent victimes les poètes de haiku étaient totalement injustifiées. Je soutiens de tout mon coeur ce projet de monument." Et M.Kuboshima d'ajouter : "Ce monument, quand il sera érigé, nouspermettra de nous retrouver face à la vie de ces hommes de parole, face au sens de ce qu'ils voulaient exprimer".
La répression fut à l'époque justifiée par ladite "Loi pour la préservation de la paix". Des dizaines de poètes furent arrêtés à cause d'expressions plus ou moins pacifistes, ou encore parce que les autorités considéraient qu'une simple description des diffultés de vie en temps de guerre constituait une critique envers le pouvoir en place. Sur la stèle, il est prévu de graver une quinzaine de haïkus représentatifs, avec le nom des auteurs, et un texte explicatif qui se termine ainsi: "Avec ce monument, nous promettons de ne plus jamais accepter que le pouvoir plonge nos vies dans les ténèbres, nous formons le voeux que la paix prévale et que les droits de l'Homme, dont la liberté de pensée, de parole et d'expression, soient toujours respectés."
En ce moment, les deux chambres du Parlement japonais commencent justement à débattre d'un projet de modification du droit pénal intitulé : "Loi contre la préparationd'actes terroristes ou autres". M. Mabesoone nous a déclaré: "Ce projet de monument n'a aucune motivation proprement politique.Cependant, personnellement, il me semble que, plus que jamais, il est nécessairede faire preuve d'esprit critique, tout comme ces jeunes poètes qui furent autrefois injustement persécutés."
Exemples de haïkus qui seront gravéssur le monument :
降る雪に胸飾られて捕へらる
Furuyuki ni Mune kazararete Toraeraru
Sur ma poitrine tombe la neige
Telle une décoration :
Moment de mon arrestation. (1941) Fujio AKIMOTO
我講義軍靴の音にたゝかれたり
Wagakōgi Gunka no oto ni Tatakaretari
A la porte de mon cours,
Elles frappent toujours.
Les bottes des militaires. (1937)Hakubunji INOUE
戦争をやめろと叫べない叫びをあげている舞台だ
Sensōwo yamero to Sakebenai sakebi wo Agete iru
butaida
«Arretez la guerre ! » –
Ce cri interdit,
Poussé sur scene. (1929)Issekiro KURIBAYASHI
大戦起るこの日のために獄をたまわる
Taisenokoru Kono hi no tameni Goku wo
tamawaru
Aujourd’hui, la guerre mondiale a éclaté.
De ce fait, vous me voyez tres honoré
D’etre emprisonné. (1941)Mudo HASHIMOTO
銃後といふ不思議な町を丘で見た
Jugoto iu Fushigi na machi wo Oka de mita
A l’arriere du front,
De ma colline, regarder cette ville
Que je ne comprends pas. (1938)Hakusen WATANABE